
Menaces actuelles
Toutes les abeilles sont-elles menacées ?
On entend et lit souvent que toutes les populations d'abeilles sont en train de s'effondrer à travers le monde, mais qu'en est-il vraiment ? La première distinction à faire est de savoir de quelle abeille parle-t-on, car la situation varie beaucoup d'une espèce à l'autre. Certaines se portent bien alors que d'autres sont menacées ou sur le point de disparaître. Il existe trois grands cas de figure :

L'abeille mellifère (Apis mellifera) ne court aucun risque d'extinction (© Nicolas Vereecken)
1. L'abeille mellifère européenne (Apis mellifera), qui est domestique et n'existe probablement plus à l'état sauvage en Europe, est un animal d'élevage dont les populations sont facilement gérées et multipliées par les apiculteurs. Bien qu'étant impactée négativement par des maladies, parasites et certains pesticides, leur population et le nombre de colonies seraient stables ou en augmentation en Belgique. Elles ne sont donc pas menacées d'extinction et n'ont pas besoin d'être 'sauvées', quoi qu'en disent de nombreux sites alarmistes mal informés !

L'osmie cornue (Osmia cornuta) s'est très bien adaptée à la vie en ville (© Nicolas Vereecken)
2. Certaines espèces d'abeilles sauvages telles que le bourdon terrestre (Bombus terrestris) et l'osmie cornue (Osmia cornuta) ont des besoins écologiques peu contraignants et se sont donc bien adaptées au changement du paysage en Belgique au cours des derniers siècles. Butinant de nombreuses plantes sauvages ainsi que les fleurs de nos fruits et légumes, nichant dans les parcs, jardins et friches, elles restent bien présentes dans nos régions et continuent à assurer leur rôle de pollinisateurs des millieux naturels, agricoles et urbains.

La mélitte de la salicaire (Melitta nigricans) ne récolte de pollen que sur la salicaire (Lythrum salicaria)(© Nicolas Vereecken)
3. D'autres espèces d'abeilles sauvages, comme par exemple la mélitte de la salicaire (Melitta nigricans), ont des niches écologiques très restreintes, ne butinant qu'une seule ou quelques espèces de plantes (abeilles monolectiques et oligolectiques), ou ayant besoin de lieux ou de matériaux très particuliers pour la construction de leur nid (par exemple des talus très chauds ou sols sableux, des coquilles d'escargot vides ou des fibres végétales). Plusieurs dizaines de ces espèces sont malheureusement en déclin ou ont déjà disparu de la région bruxelloise, voire de Belgique, au cours des dernières décennies.
Quelles menaces pèsent sur les abeilles sauvages ?
Sur base de la Liste Rouge Européenne des Abeilles, les menaces actuelles peuvent être regroupées en cinq grandes catégories :
1. Développement et intensification agricole
Au cours des deux derniers siècles, de nombreuses zones naturelles (forêts, prairies, zones humides) ont été converties en zones de production agricole et d'élevage, résultant en une réduction de surface de ces écosystèmes et leur dégradation, notamment par l'application d'insecticides et d'herbicides, la monoculture intensive à grande échelle et le remplacement des prairies de fauche par des productions intensives de fourrage pour bétail.
Plus précisément, chaque espèce d'abeilles sauvages a besoin d'un site de nidification adapté (sol nu bien drainé et ensoleillé, terrain sableux, talus oblique ou vertical, tige creuse, fissures, rocailles, coquille d'escargot, etc.) et d'une ou de plusieurs espèces de plantes nourricières pour s'approvisionner en nectar et pollen. La conversion de zones naturelles a fortement réduit la surface disponible pour ces lieux de nidification et ces plantes nourricières essentiellement au cycle de vie de nombreuses espèces d'abeilles.
Une prairie avec de nombreuses espèces de plantes nourricières (© Nicolas Vereecken)


Une zone de production agricole ayant une faible diversité florale (© Nicolas Vereecken)
2. Pollution et pesticides
Souvent évoqués comme la cause unique ou principale de 'la disparition des abeilles', les pesticides (principalement les herbicides, insecticides et fongicides) ne sont qu'un facteur parmi d'autres expliquant le déclin des abeilles. Malheureusement, la plupart des études toxicologiques publiées ont été effectuées sur l'abeille domestique (Apis mellifera) et le bourdon terrestre (Bombus terrestris) et l'on comprend encore mal l'impact de ces substances sur les autres espèces d'abeilles sauvages.
Certains insecticides utilisés en agriculture et horticulture ont un effet notable sur les espèces non-ciblées, entraînant une hausse de mortalité et, à des doses sublétales, affectant le comportement chez les abeilles étudiées et les rendant plus sensibles aux maladies et parasites. Les herbicides quant à eux menacent aussi les abeilles sauvages en détruisant les 'mauvaises herbes', ces plantes indigènes fournissant le pollen et nectar essentiels à la survie des abeilles. Les fongicides auraient aussi un impact sur la santé et survie de certaines espèces de bourdons.
Insecticides et herbicides sont communément utilisés en horticulture (© Stéphane De Greef)

